C’est notre projet!

À côté d’eux, nos politiques actuels font figure de petits joueurs en matière de traîtrises, retournements de vestes à tout va ou opportunisme électoral! Du sommet de l’état jusqu’à nos élus locaux, ils peuvent tous prendre exemple: ils ne leur arrivent pas à la cheville. Eux ce sont des experts, des champions toutes catégories, capables de servir nombre de régimes et de toujours passer entre les gouttes. « Le souper » la pièce de Jean-Claude Brisville est un modèle de géopolitique cynique et désabusée, remarquablement écrite, dont les héros avancent leurs pions sur l’échiquier sans scrupule, seul leur destin personnel les anime, les incidences diplomatiques ou autres ne sont que broutilles dont ils s’accommoderont toujours a posteriori. Joseph Fouché duc d’Otrante, ancien député à la Convention etc… à jamais Ministre de la Police de sinistre mémoire, spécialiste de coups tordus quel que soit son monarque, est invité dans son hôtel particulier par Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord éternel Ministre des Affaires Étrangères tout aussi insubmersible, avec pour plat principal de ce  fastueux repas « deux heures pour trouver un régime à la France »… Décor soigné, meubles de style tout de velours rouge, argenterie, cognac et champagne à profusion, l’un, lavallière sur redingote noire austère, a des dossiers compromettants sur tout le monde et s’empresse de le faire savoir, l’autre tout en dentelles, chemise à jabots et costume ivoire, « de la merde dans un bas de soie » résumait Napoléon, s’abrite derrière ses manières aristocratiques toutes de dédain fielleux pour défendre son point de vue. « Le mitrailleur de Lyon et le diable boiteux » ne sont d’accord que sur un point: comploter et conspirer. Fourbes et pervers à souhait, ne reculant devant rien pour parvenir à leurs fins, à savoir assurer l’avenir en toutes circonstances: « trahir par vertu » toujours!!! Ces échanges sur le fil du rasoir sont d’une rare justesse, entre louanges perfides, discours mielleux et petits secrets inavouables, où les coups fourrés sont légion et le couteau jamais éloigné du dos de son interlocuteur. « Ce sera vous et moi ou ni l’un ni l’autre » synthétise parfaitement la situation. Nul mieux que Chateaubriand dans ses Mémoires d’outre-tombe pour qualifier ces deux personnages réunis lors de cette soirée du 6 juillet 1815 à minuit. « Tout à coup une porte s’ouvre: entre silencieusement le vice appuyé sur le bras du crime, M. de Talleyrand marchant soutenu par M. Fouché; la vision infernale passe lentement devant moi, pénètre dans le cabinet du roi et disparaît. Fouché venait jurer foi et hommage à son seigneur; le féal régicide, à genoux, mit les mains qui firent tomber la tête de Louis XVI entre les mains du frère du roi martyr; l’évêque apostat fut caution du serment »…  Christophe Ribeyre, regard d’acier et profil aquilin et Quentin Muller onctueux jusqu’à l’indécence, incarnent à merveille les deux héros. Un seul regret: l’acoustique, la salle de la chapelle Jeanne d’Arc rebaptisée B Shop où se déroulait ce spectacle magnifique d’intelligence résonne beaucoup trop et rend difficile d’apprécier chaque réplique à sa juste valeur. Prochaine représentation du Théâtre pour demain et après même lieu aujourd’hui 16 heures 30 puis le samedi 4 octobre au Prieuré du sauvage à Balsac à 16 heures 30 en plein air si possible.                                                                                                    Une leçon d’Histoire à ne pas manquer.

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